Le sommeil, une question de survie ?

Hygiène du sommeil

Le plus souvent, on se rend compte de l’importance du sommeil quand on ne dort pas, ou trop peu : on se sent irrité, on a des difficultés à se concentrer, notre mémoire nous fait défaut et notre appétit est troublé. Il joue donc un rôle-clé pour notre bien-être global dans la journée. Mais quelles sont ses fonctions connues, aujourd’hui, en 2018 ? Son rôle va-t-il plus loin que notre bien-être quotidien ?

Toujours pas de réponse complète mais UNE certitude

Parfois, on ne fait pas les choses, en se disant, je ne vois pas à quoi ça sert… et puis on regrette et on se dit « Ah tiens, j’aurais dû », mais parfois c’est trop tard. Et bien pour le sommeil, si vous faisiez le test de ne pas dormir du tout pendant une longue période (très longue quand même et vous n’y arriveriez sans doute pas ) sous prétexte que nous ne savons toujours pas vraiment à quoi ça sert, vous n’auriez pas l’occasion de le regretter… Vous seriez mort !

En effet, à défaut de pouvoir démontrer les différentes fonctions du sommeil, les pionniers de la recherche sur le sommeil ont fait le test (pas sur eux bien sûr). Le postulat est simple : pour savoir à quoi sert une action, il suffit d’empêcher qu’elle se produise et d’en observer les conséquences. Parmi diverses observations, aux États-Unis, des chercheurs1 ont pu démontrer qu’au bout d’en moyenne 21 jours de privation totale de sommeil, des rats soumis à ce traitement étaient morts alors que l’autopsie ne révélait aucun problème de santé. Puis ils sont allés plus loin en privant des rats de sommeil paradoxal ou de sommeil profond. Et, à chaque fois, avec des délais différents, les rats mouraient dans les mêmes conditions. Ainsi, on peut affirmer que, oui, le sommeil est essentiel, non, on ne sait pas pourquoi ni comment mais qu’une chose est certaine, on ne peut pas vivre sans dormir ni en étant privé de l’un ou l’autre des temps de sommeil paradoxal et profond.

Ce qu’on sait des fonctions du sommeil

Au-delà de la conséquence extrême d’une privation de sommeil, différentes études scientifiques et empiriques nous permettent de lister quelques fonctions plus précises du sommeil.

Dans les années 60, un jeune homme s’est donné pour mission de battre le record du maintien de l’éveil2. Un chercheur de l’époque s’est invité pour en faire une expérience scientifique. Et, il a pu constater que le manque de sommeil avait un impact certain sur les fonctions cognitives et comportementales mais sans conséquences après avoir enfin dormi. Et surtout, il a pu conclure que toutes les autres fonctions de l’organisme fonctionnaient à peu près normalement. Ainsi seul le cerveau et le système nerveux seraient vraiment impactés.

Mais depuis, on a découvert encore bien d’autres fonctions du sommeil :

  • Le sommeil permet de « restaurer » le cerveau

Contrairement aux autres organes, il n’y a que pendant le sommeil que le cerveau peut récupérer3. L’espace entre les cellules nerveuses représente 14% du volume du cerveau. Et bien, pendant le sommeil, ce volume passe à 23 % et permet au liquide céphalorachidien (le « jus » du cerveau) de circuler plus facilement entraînant avec lui les toxines accumulées pendant l’éveil.

  • Le sommeil permet de consolider la mémoire

La consolidation de la mémoire, c’est quand on mémorise ce qu’on a appris pou pouvoir le restituer ensuite. Et cette consolidation est la plus efficace pendant le sommeil, même de courte durée, à moindre efficacité cependant. Ce travail de consolidation n’est pas simplement un ajout de mortier sur des parpaings, il s’agit d’un vrai travail d’analyse et d’organisation des informations pour les intégrer aux souvenirs déjà enregistrés. Et, si toutes les phases sont importantes pour la mémorisation, un premier tri entre ce qu’il faut retenir et ce qu’il faut oublier se fait pendant le sommeil profond.

  • Le sommeil favoriserait la sécrétion de l’hormone de croissance

L’hormone de croissance est sécrétée majoritairement pendant le sommeil profond en première partie de nuit. Du coup, c’est bon pour la croissance mais aussi pour la régénération cellulaire chez l’adulte.

  • Dormir favoriserait une bonne réponse immunitaire

Ce n’est peut-être pas pour rien que quand nous sommes malades, nous dormons plus. Des chercheurs allemands4 l’ont démontré en 2011 en faisant faire une nuit blanche à une moitié de personnes venant de se faire vacciner contre l’hépatite A versus une moitié qui a pu dormir normalement. Au bout d’un an, les taux d’anticorps du premier groupe étaient restés plus bas que ceux du deuxième groupe.

  • Le sommeil aiderait au maintien du poids

Quand on dort bien, notre sécrétion de ghréline, une hormone qui donne faim diminue et à l’inverse, nous produisons plus de leptine, l’hormone de la satiété. En clair, quand on dort bien on ressent moins de besoin de manger et on est plus vite rassasié donc on mange juste ce qu’il faut, pas plus. Evidemment, la gourmandise c’est autre chose !

Ce tour d’horizon des fonctions du sommeil n’est qu’une infime partie de ce que vous pourriez apprendre sur le sommeil. Pour en savoir plus sur ce mystère, nous vous conseillons la lecture de l’excellent livre « Je rêve de dormir » par les docteurs José Haba-Rubio et Raphaël Heinzer aux éditions Favre, dont une majorité des données ont été tirées.

 

  1.  https://jamanetwork.com/journals/jamaneurology/article-abstract/565718?redirect=true
  2. Lange T, Born J (2011) The immune recovery function of sleep – tracked by neutrophil counts. Brain Behav Immun 25:14-15